L’icône aérée

Auteur: Paul Eluard
Année: 1926
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L’icône aérée qui se conjugue isolément peut faire une place décisive à la plus fausse des couronnes ovales, crâne de Dieu, polluée par la terreur. L’os gâté par l’eau, ironie à flots irrités qui domine de ses yeux froids comme l’aiguille sur la machine des bonnes mères la tranche du globe que nous n’avons pas choisie.
Doux constructeurs las des églises, doux constructeurs aux tempes de briques roses, aux yeux grillés l’espoir, la tâche que vous deviez faire est pour toujours inachevée. Maisons plus fragiles que les paupières d’un mourant, allaient-ils s’y employer à qui perd gagne ? Boîtes de perles avec, aux vitres, des visages multicolores qui ne se doutent jamais de la pluie ou du beau temps, du soleil d’ivoire ou de la lune tour à tour de soufre et d’acajou, grands animaux immobiles dans les veines du temps, l’aube de midi, l’aube de minuit, l’aube qui n’a jamais rien commencé ni rien fini, cette cloche qui partout et sans cesse sonne le milieu, le cœur de toute chose, ne vous gênera pas. Grandes couvertures de plomb sur des chevelures lisses et odorantes, grand amour transparent sur des corps printaniers, délicats esclaves des prisonniers, vos gestes sont les échelles de votre force, vos larmes ont terni l’insouciance de vos maîtres impuissants et désormais vous pouvez rire effrontément, rire, bouquet d’épées, rire, vent de poussière, rire comme arcs-en-ciel tombés de leur balance, comme un poisson géant qui tourne sur lui-même. La liberté a quitté votre corps.

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