I
Les vagues des murs et l’air absent des enfants
Le plâtre gris des maisons mortes
La pierre morte autour des portes inutiles
Des enfants réduits et les murs leur vont bien
Comme à l’éclat de l’eau la boue du printemps
Comme à la beauté vierge une grimace bête
Et l’envie de vomir roule et rêve dans l’herbe.
II
Deux ombres sur la terre borgne
La mauvaise parole
Et la mauvaise nuit
Et la cloche de chair sous le linge fuyant
De la peur accroupie
Deux ombres sur la terre froide
Où les vers s’échauffent
Mieux que le blé
Sur la terre froide où parler descend
Où la femme est la fin de l’homme
Deux ombres une seule nuit
Définitive les coquins
Avaient raison de raisonner
Vitres salies feu confiné
Vitres brisées feu dispersé
Misère dépouillée d’espoir.
III
Rien de plus pauvre qu’un enfant
Rien de plus pauvre que sa mère
Rien de plus pauvre qu’un soldat
Qu’un chien qu’un employé de banque
Ô confusion la terre borgne
Un œil crevé pour ne rien voir
Un œil au ciel pour oublier
L’hiver tue au hasard partout comme un avare
Son cœur s’éteint il est trop tard
Pour exalter sa vie passée
Et sa naissance dans les caves
Son âge d’or sous des haillons et sous des rides
Sous des soucis de marque sous son propre poids.
IV
Mais soudain de parler je me sens conquérant
Et plus clair et plus vif et plus fier et meilleur
Et plus près du soleil et plus sûr de durer
Un enfant naît en moi qui n’est pas d’aujourd’hui
Un enfant de toujours par un baiser unique
Plus insouciant qu’un premier papillon
À l’aube le printemps lui donne une seconde
Et la mort est vaincue un enfant sort des ruines
Derrière lui les ruines et la nuit s’effacent