Son dernier Nicolas, son dernier Bonaparte !
Oui, crachez vos serments, hurlez vos Te Deums,
Invoquez vos Agnus, vos bons dieux, vos Mahoms !
Que les czars et les-rois et les hommes des sacres
Lancent tous les bourreaux, fassent tous les massacres !
Que nous soyons trahis, vaincus, chassés, brisés,
Et que tous les Judas donnent tous les baisers !
Finissons-en ; voici nos têtes pour le glaive !
Pourvu qu’à l’orient une blancheur se lève !
Pourvu que, dans ses mains tenant tous les flambeaux,

L’éclatant avenir sorte de nos tombeaux !
Pourvu que naisse enfin la nouvelle âme humaine !
Pourvu qu’au vieil Adam Dieu par la main amène,
Après tant de douleurs, tant de sang, tant de fiel,
Cette âme, Ève d’en haut, la future du ciel !
Pourvu qu’un jour, jour saint et dont mon cœur tressaille,
Après nous ; derniers morts du grand champ de bataille,
Derniers épis du ; mal, derniers martyrs du fer,
On voie, en un Eden fait avec notre enfer ;
Debout sur notre cendre et sur notre désastre,
L’homme-adorant la paix, l’aigle regardant l’astre !

18 octobre 1854.