Il s’en est allé par la route, le pauvre homme, il s’en est allé sans un doute, bravement, à petits pas comptés par son bâton tremblant, il s’en est allé sans se retourner.
C’est qu’il ne va pas fort loin, le cher homme. Ah, il n’en a pas pour dix-huit cents ans. Il n’a jamais fait de mal à personne, lui. Il a toujours été si prudent.
Deux doigts de route, et puis c’est un sentier, un tout petit sentier qui reconduira l’homme, le tout petit cher homme au point qu’il a quitté. Et pourquoi le malheur viendrait-il arrêter ce bon petit rentier dans son petit sentier ?
Il y trotte, y toussote, y crachote, y grignote, y jabote à lui-même et clignote content, y mijote au soleil son vieux cœur radotant, y vivote et s’y trouve heureux en vivotant.
Oui, qu’est-ce que le Malheur pourrait vouloir à c’t homme, quand son plus gros ennui serait de trop trotter ? Certainement… la mort, ça peut arriver. Ah, la mort, la grande route, on y marche longtemps. Mais bah, n’y a-t-il pas ce bon monsieur l’abbé pour vous greffer dessus un bon petit sentier, — ce bon monsieur l’abbé qui vient au bon moment ?