Quand le ruisseau de la fontaine
S’éclaircit et la marjolaine
Au joyeux soleil du printemps
Et que du rossignol le chant
S’élève et module et s’affine
Sur la branche de l’aubépine,
Il faut que j’entonne le mien
Amour de la terre lointaine
Pour vous tout mon corps est dolent,
Car ne fut plus gente chrétienne.
Heureux pour qui elle est parlant
De désir mon cœur est tiré
Vers cène dame qu’entre tous j’aime.
Pour elle ai toujours soupiré,
Mais ne veux pas que l’on me plaigne,
Car de la douleur naît la joie.
Lorsque les jours sont longs en mai,
Le doux chant des oiseaux me plaît
Et quand peu à peu il s’éteint
D’un amour lointain me souvient
Je marche alors tête baissée
Et non plus que saison glacée
Me plaît alors le chant d’oiseau
Ou le gazouillis du ruisseau.
Je le tiendrai pour vrai
Seigneur
Par qui verrai l’amour lointain,
Mais malgré l’espoir de tel heur
J’ai mal, car il est trop lointain
Ah ! que ne suis-je pèlerin
Là-bas pour porter le bourdon
Et recevoir le meilleur don
D’être contemplé par ses yeux.
Jamais d’amour ne jouirai
Sinon de cet amour lointain,
Car femme ne connais meilleure
Ni plus gracieuse en cette heure
De nulle part, ni près ni loin.
Pour elle et pour lui rendre soin
Je consens à être captif
Là-bas au pays sarrasin.
Il dit vrai celui qui m’appelle
Le désireux d’amour lointain,
Car nulle autre joie ne révèle
Que jouir de l’amour lointain,
Mais tous mes voeux sont inutiles
Et je suis voué à ce sort
D’aimer toujours sans être aimé.