A une jeune Soeur converse du nom de Mélanie Marie-Madeleine pour le jour de sa profession.

En ce beau jour, ô Madeleine,
Nous venons chanter près de vous
La merveilleuse et douce chaîne
Qui vous unit à votre Epoux.
Ecoutez la charmante histoire
D’une bergère qu’un grand Roi
Voulut un jour combler de gloire,
Et qui répondit à sa voix

Refrain.

Chantons la bergère,
Pauvre sur la terre,
Que le Roi du ciel
Epouse en ce jour au Carmel.

Une petite bergerette,
En filant, gardait ses agneaux.
Elle admirait chaque fleurette,
Ecoutait le chant des oiseaux ;
Comprenant bien le doux langage
Des grands bois et du beau ciel bleu,
Tout pour elle était une image
Qui lui révélait le bon Dieu.

Elle aimait Jésus et Marie
Avec une bien grande ardeur.
Ils aimaient aussi Mélanie,
Et vinrent lui parler au coeur.
« Veux-tu, disait la douce Reine,
« Près de moi, sur le Mont Carmel,
« Veux-tu devenir Madeleine,
« Et ne plus gagner que le ciel ?
« Enfant, quitte cette campagne,
« Ne regrette pas ton troupeau ;
« Là-bas, sur ma sainte Montagne,
« Jésus sera ton seul Agneau. »
— « Oh ! viens, ton âme m’a charmée »,
Redisait Jésus à son tour ;
« Je te prends pour ma fiancée,
« Tu seras à moi sans retour. »

Avec bonheur l’humble bergère
Répondit à ce doux appel,
Et, suivant la Vierge, sa Mère,
Parvint au sommet du Carmel.

C’est vous, petite Madeleine,
ue nous fêtons en ce grand jour.
La bergère est maintenant reine
Près du Roi Jésus, son Amour!

Vous le savez, ô soeur chérie,
Servir notre Dieu, c’est régner.
Le doux Sauveur, pendant sa vie,
Ne cessait de nous l’enseigner
« Si, dans la céleste patrie,
« Vous voulez être le premier,
« Il faudra, toute votre vie,
« Vous cacher, être le dernier. »

Heureuse êtes-vous, Madeleine,
De votre place, en ce Carmel !
Serait-il pour vous quelque peine,
Etant si proche du beau ciel ?
Vous imitez Marthe et Marie
Prier, servir le doux Sauveur,
Voilà le but de votre vie ;
Il vous donne le vrai bonheur.

Si parfois l’amère souffrance
Venait visiter votre coeur,
Faites-en votre jouissance ;
Souffrir pour Dieu, quelle douceur !
Alors les tendresses divines
Vous feront bien vite oublier
Que vous marchez sur les épines,
Et vous croirez plutôt voler…

Aujourd’hui l’Ange vous envie,
Il voudrait goûter le bonheur
Que vous possédez, ô Marie,
Etant l’épouse du Seigneur !
Bientôt, dans les saintes phalanges,
Parmi les Trônes, les Vertus,
Vous direz bien haut les louanges
De votre Epoux, le Roi Jésus.

Bientôt la bergère,
Pauvre sur la terre,
S’envolant au ciel,
Régnera près de l’Eternel1

20 novembre 1894.