I
Ran tan plan !
Tape, tambour, tape encore.
Pan pan pan,
Pif paf boum, ran plan tan plan,
Gai l’aurore !
On fait de la peine aux rois,
Viens à leur secours, bourgeois,
Avec ton enthousiasme,
Ton parapluie et ton asthme.
Tape encor, tape, tambour.
Gai le jour !
Faut-il des rois sur les têtes
Des peuples changés en bêtes ?
Tu dis oui, toi le canon.
Moi le pavé, je dis non.
Tape, tambour, tape encore.
Ran tan plan,
Pan pan pan,
Pif paf boum, ran plan tan plan,
Gai l’aurore !
Et toi, mon vieux chiffonnier,
Prends ton croc et ton panier,
Car il est temps que tu pinces
Tous les rois et tous les princes.
Tape encor, tape tambour.
Gai le jour !
Ce tas de trônes cahote.
Flanque-les tous dans ta hotte,
Depuis le roi Dagobert
Jusqu’à l’empereur Gobert.
Tape, tambour, tape encore.
Ran tan plan,
Pan pan pan,
Pif paf boum, ran plan tan plan,
Gai l’aurore !
II
Quand Dalila, Paméla,
Atala, Stella,
Lola,
Trouveront pour leurs filets
Les-mylords anglais
Trop laids,
Quands les avocats plaidants,
Quand les noirs pédants
Grondants,
Quand les harangueurs des cours,
Feront des discours
Trop courts,
Quand les peuples lèveront
Plus haut que l’affront
Leur front,
Et n’auront plus sur les bras
Tout ce tas d’ingrats
Trop gras,
On ne verra plus Gamin
Tendre, nain romain,
La main,
Et marcher sur les. talons
De ses pantalons
Trop longs.
III
La bourgeoisie est un veau
Qui s’enrhume du cerveau
Au moindre vent frais qui souffle ;
Le bourgeois c’est la pantoufle
Qu’un roi met sous ses talons
Pour marcher à reculons.
Je fais la chansonnette,
Faites le rigodon.
Ramponneau Ramponnetté, don !
Ramponneau Ramponnette !
Le bourgeois est un grimaud
Qui prend sa pendule au mot
Chaque fois qu’elle retarde.
Il contresigne en bâtarde
Coups d’état, décrets, traités,
Et toutes les lâchetés.
Je fais la chansonnette,
Faites le rigodon.
Ramponneau Ramponnette, don !
Ramponneau Ramponnette !
Il enseigne à ses marmots
Comment on rit de nos maux ;
Pour lui, le peuple et la France,
La liberté, l’espérance,
L’homme et Dieu, sont au-dessous
D’une pièce de cent sous.
Je fais la chansonnette,
Faites le rigodon.
Ramponneau Ramponnette, don !
Ramponneau Ramponnette !
Le bourgeois a des regrets ;
Il pleure sur le progrès,
Sur ses loyers qu’on effleure,
Sur les rois, fiacres à l’heure,
Sur sa caisse, et sur la fin
Du monde où l’on avait faim.
Je fais la chansonnette,
Faites le rigodon.
Ramponneau Ramponnette, don !
Ramponneau Ramponnette !
18 octobre 1861.