Notre sensibilité travaillée par trop de secousses n’est plus capable de s’émouvoir par convenance devant un certain hiératisme d’aspect, voire de substance; ce qui la touche c’est, plutôt que la nature, la caste d’un sentiment, sa densité intérieure, sa force, son jaillissement. Nous ne croyons plus à autre chose. La grandeur pour la grandeur n’est pas pour nous la grandeur, mais la pression interne des choses, leur indiscutabilité. C’est je crois dans ce sens que Cocteau a repris Antigone. Il est remonté aux sources, mais aux sources psychologiques, humaines, non aux sources littéraires, – et aussi aux sources mythologiques, dans le drame réel qu’elles évoquent. Il a voulu nous donner un équivalent actuel de la substance du vieux drame et que nous puissions y croire à nouveau. Quant à Poizat et à son Électre, la platitude de sa poésie, le bousillage et la guimauve foraine des mises en scène dont il se satisfait, prouvent la triste conception qu’il se fait de la tragédie.