XII
Quand Daoud fuyait seul par les rochers
Les pierres de Semei hurlaient :
Daoud, ton fils
le sais-tu, accroché sous les palmes d’un palmier ?
Daoud ton fils,
Sais-tu qu’il est cible aux flèches des sicaires ?
Mon fils s’est réjoui de Thamar et j’ai souffert
C’est bien Daoud son père qui voulut Bethsabée
et Soliman son frère qu’embrasse la Sulamite
Daoud, ton fils
Les couteaux des mercenaires étoilent sa chair
Et ce fut un enfant qui riait aux sourires.
Daoud quand Michol te cachait dans sa chair
tu chantais à ses lèvres :
le tyran dont ma harpe somnole les caprices
le même qui voulut, que nu, seul d’une fronde
J’affronte le Goliath bardé de fer
et dit : ta fièvre
de méchant fou
suffit à faire un roi, ou la pâture aux corbeaux des airs
Le tyran dont la rare parole menace
Les seuls désarmés des mémoires d’anciennes victoires
ô toi qui me protèges de ta chair
tu lui dirais : Laban a voulu quatorze ans
les esclavages de Jacob, mais les ans
laissaient à tout printemps refleurir Jacob.
Avrom quand son bras sur le résigné
se baissait armé
entendit la voix lointaine des déserts.
« Agar seule est penchée sur son fils qui meurt au désert
Ils ont laissé les tentes vers où les cuisines prêtes
abondent de moutons et de bœufs qu’on dépèce
Ils ont cherché des gouttelettes par les sables
et des brindilles de fleurs
et les sauterelles des sables
pour construire un feu clair, calmer leur soif et leur faim dans le désert.
Et quand les dix frères vendirent l’aîné de ton âme
pour, on dit, soixante deniers
tu gardais son portrait en chair, ton Benjamin
le dernier,
tes esclaves te portaient aux vérandahs de tes tentes
Et quand le soleil s’endormait la même attente
te menait chaque soir aux horizons déserts
d’où peut-être viendra-t-il demain.
Daoud, ton fils qu’on assassine,
Thamar pleure à ses pieds, avec la Sulamite
Le soleil qui s’endort, dore ses plaies
et ses yeux bruns ternis pensent l’aurore que lui préparent
Ismaël, les Madianites, et Myriam, et Agar ;
Ton mourant te plaint, roi découronné
Roi que des pierres de passant assassinent
Et Daoud pleurait sous les pierres de Semeï
car tout châtiment, l’homme à lui-même se le prescrit ;
Semeï, ce bandit des routes étant allié
À quelque esclave de la Sulamite.